Novembre 2011 | Vol. 2 | N°3

Enquête sur la formation et le développement des compétences dans les PME de Montréal et de Winnipeg

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Au printemps 2011, DRHC Canada et l’OCDE confiait au Centre interdisciplinaire de recherche et développement en éducation et formation tout au long de la vie, la réalisation du volet canadien du projet international « Leveraging training : skills development in SMEs ». À l’origine de ce projet, il y a cette évidence à l’effet que les PME, tout comme les grandes entreprises, doivent innover pour assurer leur survie et leur croissance dans cet environnement changeant qu’est le nôtre. Or l’innovation passe par le développement des compétences de la main-d’œuvre.

Au Canada, le projet se déroule dans deux régions, le Québec et le Manitoba et plus spécifiquement, dans deux grandes villes, Montréal et Winnipeg. Il y a deux raisons qui motivent ce choix. La première, c’est la volonté d’obtenir des univers d’enquête comparables. La seconde, répond à une intuition de départ que l’on peut résumer ainsi : si les PME éprouvent des difficultés en matière de formation dans un environnement riche en ressources, cela donne une idée de l’ampleur des besoins de soutien des petites et moyennes entreprises indépendamment du contexte.

Le projet comporte plusieurs volets qui feront l’objet d’articles subséquents dans le Bulletin de l’Observatoire. Dans ce numéro, nous présentons les résultats du premier volet, un sondage téléphonique réalisé auprès de 86 PME montréalaises et 70 PME winnipégoises, entre le 15 juin et le 15 septembre 2011. Ce sondage portait sur quatre thèmes : l’innovation, la formation et le développement des compétences, la gestion de la formation et enfin, les relations des PME avec les acteurs de l’environnement de formation.

Les résultats sont d’abord présentés selon ces quatre thèmes et sont ensuite analysés à la lumière des interrogations qui balisent tout le projet : Est-ce que les PME innovent? Est-ce qu’elles forment leurs employés pour que ceux-ci participent et créent du changement? Dans quelle mesure les PME sont-elles soutenues par des ressources externes pour former et développer les compétences de leur main-d’œuvre?

Présentation des résultats

L’innovation
La formation et le développement des compétences
La gestion de la formation
L’environnement de formation

Discussion des résultats

Est-ce que les PME innovent? Oui, et le premier constat de cette enquête menée à Montréal et Winnipeg est très certainement l’importance de l’innovation au sein des PME canadiennes. Dans les deux régions, sept PME sur dix ont réalisé au moins un changement au cours de la dernière année et quatre sur dix peuvent être qualifiées d’hautement innovantes selon l’indicateur de l’OCDE. Cela étant dit, sur cet indicateur, les petites entreprises (1 à 49 employés) de Montréal sont moins performantes que celles de Winnipeg.

Est-ce que les PME forment leurs employés pour que ceux-ci participent et créent du changement? Oui mais, et c’est là le deuxième constat, les PME winnipégoises le font davantage que les PME montréalaises. Sur les indicateurs de formation, Winnipeg devance Montréal de façon importante avec un écart moyen de 9 points de pourcentage pour la formation structurée de forte intensité (4 domaines et plus) et de 8 points de pourcentage pour le développement informel de compétences en soutien aux changements (KISA). Ces résultats confirment un phénomène par ailleurs documenté, à savoir « le retard » du Québec face à l’ouest canadien en matière de formation liée à l’emploi. Cela étant dit, on remarque un écart de moindre ampleur entre les moyennes entreprises (50 à 249 employés) qu’entre les petites (1 à 49 employés) des deux régions.

Troisième constat, dans les deux régions, les investissements en développement de compétences sont concentrés au sein des strates plus qualifiées de main-d’œuvre et cela malgré la demande généralisée de formation que tendent à générer les défis d’innovation. Sur cet indicateur, les résultats sont sans équivoque, les employés « hautement et moyennement qualifiés » étant nettement avantagés comparativement aux employés moins qualifiés. Ce phénomène, par ailleurs documenté dans d’autres enquêtes, suggère que la responsabilité de la formation et du développement des compétences de la main-d’œuvre en emploi ne peut être laissée aux seules entreprises. Il ne s’agit pas de blâmer les entreprises – bien qu’elles pourraient sans doute faire davantage – mais plutôt de souligner qu’il y a encore place pour l’intervention de d’autres acteurs, notamment l’État, mais aussi les partenaires du marché du travail. Au Royaume-Uni et dans quelques autres pays européens, par exemple, les syndicats interviennent avec succès auprès des employés les moins qualifiés via les Learning union reps (voir l’article sur ce sujet dans le Bulletin du mois de mars 2011). Quant à l’État, on peut se demander si les mesures actuelles sont suffisantes pour les employés les moins qualifiés qui sont en emploi. En effet, comparativement aux sociétés européennes, il y a peu de mesures qui appuient les initiatives de formation individuelle en cours d’emploi, sinon lorsque l’entreprise ferme ou que sa survie est menacée.

Quatrième constat, les moyennes entreprises montréalaises dépassent les moyennes entreprises winnipégoises sur les indicateurs de gestion de la formation et, de façon importante, sur le budget annuel de formation (81,0% contre 61,3%). On observe le même résultat sur l’indicateur connaissance des fournisseurs de formation (85,7% contre 51,5%). Il est possible d’interpréter ce résultat comme un effet de la Loi sur les compétences qui oblige les entreprises à investir 1% de leur masse salariale en formation et une tendance de la part de celles-ci, à recourir davantage à l’offre de formation institutionnelle pour y satisfaire, d’où la très forte connaissance de cette offre.

Cinquième constat, les petites entreprises ont des comportements différents des moyennes entreprises (et plus encore des grandes) en matière de formation et de développement des compétences de la main-d’œuvre et les résultats de l’enquête le confirment une fois de plus.

Tout d’abord, les ME se distinguent le plus des PE sur les indicateurs d’institutionnalisation de la gestion des ressources humaines que sont la planification et la budgétisation de la formation et le fait de disposer à l’interne d’un responsable des ressources humaines qui porte ce titre. C’est là un résultat qui marque les deux régions et auquel on pouvait s’attendre puisqu’il est déjà documenté dans les études démontrant les effets de la taille des entreprises sur la formation (voir dans ce Bulletin, l’article de Pierre Tousignant).

Ensuite, les ME montréalaises supplantent les PE sur tous les indicateurs de l’enquête et de façon importante (les écarts moyens observés allant de 5 à 18 points de pourcentage), alors que les ME winnipégoises dépassent les PE de façon significative sur les indicateurs de gestion de la formation, principalement. Ce sont donc les PE montréalaises qui posent problème.

Considérant notre interrogation de départ, il semble bien que les PME montréalaises aient besoin de soutien en matière de formation et de développement des compétences, surtout les plus petites d’entre elles, même si elles baignent dans un environnement riche en ressources. Dès lors, la question devient que peut-on faire de plus et différemment? C’est là le deuxième volet de l’enquête que nous aborderons dans le prochain numéro du Bulletin.

Extrait

Au printemps 2011, DRHC Canada et l’OCDE confiait au Centre interdisciplinaire de recherche et développement en éducation et formation tout au long de la vie, la réalisation du volet canadien du projet international « Leveraging training : skills development in SMEs ». À l’origine de ce projet, il y a cette évidence à l’effet que les PME, tout comme les grandes entreprises, doivent innover pour assurer leur survie et leur croissance dans cet environnement changeant qu’est le nôtre. Or, l’innovation passe par le développement des compétences de la main-d’œuvre.

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